Adrien BÉAL
Metteur en scène

Adrien a reçu une aide à la production pour son spectacle Récits des Evènements futurs.

Quel est votre parcours artistique ?
Ma première expérience de mise en scène remonte à plus de dix ans, alors que j'étais étudiant à l'université Paris 3. J'ai d'abord travaillé sur des textes d'auteurs contemporains: Michel Vinaver, Roland Schimmelpfennig, Oriza Hirata et Guillermo Pisani. Puis j'ai mis en scène une pièce plus ancienne, Le Canard sauvage d'Ibsen, et à partir de là, mon travail a un peu changé. J'ai commencé à mettre davantage en question mon rapport aux textes, et depuis, j'ai alterné des mises en scène de textes des auteurs qui me nourrissent, avec des créations de spectacles élaborés en répétitions avec les acteurs. Vinaver, Schimmelpfennig, et aussi Pasolini sont les auteurs dont j'ai monté des textes ou à partir desquels j'ai travaillé au plateau ces dernières années. Mon parcours est aussi fait de rencontres importantes, avec des personnes qui m'ont accueillies sur leurs projets comme notamment Bernard Grosjean qui dirige la compagnie de théâtre d'intervention Entrées de Jeu dans laquelle j'ai joué pendant de nombreuses années, Guillaume Lévêque que j'ai assisté à la mise en scène sur une pièce de Vinaver, ou l'équipe actuelle de la Colline où j'ai fait un long stage en 2010. Les rencontres avec les acteurs et collaborateurs comptent beaucoup, au contact de certains, j'ai progressé dans ma manière de travailler les textes, avec d'autres c'est sur les questions d'espace, de jeu que j'ai fait du chemin. Je pense notamment à David Farjon, Guillermo Pisani, Arthur Igual, plus récemment à Charlotte Corman, Etienne Parc et Pierric Plathier avec qui je viens de faire un spectacle et à Fanny Descazeaux, qui co-anime avec moi la compagnie Théâtre Déplié depuis 2009, et qui se charge notamment de la production. Enfin, mon parcours et celui de la compagnie se font avec des théâtres qui accueillent le travail, la recherche, et les spectacles. Notre maison a longtemps été le Théâtre de Vanves, puis notre réseau s'est élargi et s'est constitué de plusieurs lieux indépendants, tous franciliens, attentifs aux projets fragiles et peu visibles : l'Atelier du plateau, l'Echangeur, Lilas en Scène, la Loge. Aujourd'hui, d'autres lieux en région parisienne nous accompagnent : le Studio Théâtre de Vitry, le Monfort et à ces lieux s'ajoutent désormais de grands théâtres de région, tels le Tandem Douai-Arras, la Comédie de Valence ou le Théâtre Dijon Bourgogne.  

Quel regard portez-vous aujourd'hui sur votre profession ?
Je peux parler de l'Ile-de-France où j'ai vu beaucoup de spectacles de tous genres depuis une quinzaine d'années. Je crois que la variété de propositions et de tentatives y est très importante. C'est enrichissant d'être spectateur de cela. Ce qui est frappant, et qui en dit beaucoup sur notre profession, c'est l'immense écart entre les conditions et les contextes de fabrication, de production des spectacles. On a souvent l'impression que les gens qui n'évoluent que dans l'institution pensent qu'ils sont le théâtre. Mais c'est faux. Ils en sont la part la plus visible du grand public. A côté de l'institution qui dispose des moyens financiers, de la visibilité et d'un certain confort, de nombreuses équipes, de nombreux lieux travaillent avec très peu de moyens et inventent des manières de travailler qui participent grandement à l'évolution du paysage théâtral. Il y a bien sûr des circulations des personnes et de certaines équipes entre ces différents niveaux, mais la réduction des écarts de moyens pourrait notamment permettre aux spectateurs de profiter davantage de la diversité des propositions.  Certains spectacles ne peuvent être fabriqués que dans l'institution, et d'autres ne peuvent l'être qu'en dehors, ou à la lisière.

Comment vous voyez-vous dans 5 ans ? Dans 10 ans ?
J'espère continuer de creuser mon sillon, laisser la place à la recherche, et par exemple faire des spectacles qu'aujourd'hui je ne suis pas encore capable d'imaginer. Et je rêve de réussir à ne pas me disperser.

 

Interview réalisée en 2015
Photographie : Emilie Arfeuil